Jean-Louis SANTINI |
Le suspense est à son comble dans la communauté
scientifique avant les derniers résultats attendus mercredi de la traque du
boson de Higgs, une particule considérée comme la clé de voûte manquante de la
physique moderne.
Ce que les physiciens doivent dévoiler à Genève lors d'une
conférence de presse au CERN (Organisation européenne pour la recherche
nucléaire), qui abrite le plus grand accélérateur de particules du monde, le LHC
(Grand collisionneur de Hadrons), pourrait enfin confirmer ou infirmer
l'existence du boson de Higgs après des décennies de recherche infructueuse.
Cette particule est l'élément clé jamais observé dans la
théorie du «Modèle standard de la physique des particules» élaborée dans les
années 60 pour décrire la structure fondamentale de la matière visible dans
l'univers.
Selon ce modèle, le boson de Higgs explique pourquoi des
particules sont dotées d'une masse et d'autres pas. Sa détection validerait donc
cette théorie.
Le physicien britannique Peter Higgs avait postulé en 1964
l'existence de cette particule à laquelle il a donné son nom.
En décembre 2011, les derniers résultats des expériences Atlas
et CMS présentés au CERN resserraient considérablement «la fenêtre» où se
trouverait le célèbre boson. Il se cacherait aux environs d'une masse de 125
gigaélectronvolts (GeV), où les deux expériences (Atlas et CMS) ont observé un
«excès de fluctuations» lors des collisions de protons dans le LHC.
Mais la marge d'erreur statistique n'est pas suffisamment
faible pour déclarer avec certitude l'existence d'une nouvelle particule,
expliquent ces chercheurs, citant une probabilité d'erreur inférieure à un sur
3,5 millions.
Les deux équipes de physiciens se sont donc remises à
l'ouvrage, analysant une abondante moisson de nouvelles données produites par
des milliards de collisions de protons.
«Un grand
moment»
«Nous avons maintenant plus que doublé le nombre de données
obtenu en 2011», précisait récemment Sergio Bertolucci, directeur de la
recherche au CERN. «Cela devrait nous permettre de voir si les observations de
2011 se confirment ou pas», poursuit-il, ajoutant: «nous vivons un grand
moment».
Déjà en mars, la communauté des physiciens se déclarait
optimiste. «La fin de la traque pour saisir le boson de Higgs est proche», juge
Jim Siegrist, du ministère américain de l'Énergie.
«Il est certain que les deux expériences menées indépendamment
au LHC ont la capacité d'apporter une réponse définitive sur le boson de Higgs
et tout le monde s'y attend en 2012, la semaine prochaine ou plus tard cette
année», note Joe Lykken, de l'expérience CMS, lors d'un entretien avec
l'AFP.
Si le boson de Higgs n'existe pas, «ce serait une nouvelle
encore plus grande» qui, en remettant en cause le Modèle standard de la
physique, «révolutionnerait notre pensée», souligne ce scientifique.
Une autre hypothèse tout aussi exaltante serait la découverte
d'une nouvelle particule proche de celle de Higgs mais différente, relèvent
d'autres physiciens. Une telle découverte pourrait aider à percer les mystères
de la matière et de l'énergie sombres qui représenteraient 95% de l'univers.
Lundi matin, le Fermilab de Chicago, hébergeur du Tevatron qui
a été longtemps le plus puissant accélérateur de particules, fera une annonce à
Chicago portant sur l'analyse des données produites durant dix ans par les
collisions de particules dans l'accélérateur désormais hors service.
Le physicien Peter Woit, de l'Université Columbia à New York,
écrit sur son blogue que le «Fermilab va essayer de dérober une petite partie de
l'attention avant l'annonce du LHC mercredi en faisant part de nouveaux indices
de l'existence de Higgs».
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