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mercredi 4 juin 2014

Hausse de vos taxes scolaires, prise 2





Les propriétaires qui ont subi une augmentation salée de leur taxe scolaire l'été dernier ne doivent pas rêver en couleurs. Malgré les promesses du gouvernement péquiste, ils ont autant de chance de recevoir un remboursement de la part de leur commission scolaire que le Canadien en a de remporter la Coupe Stanley cette année.
Mais ce n'est pas ça, le pire. Si la tendance se maintient, les contribuables de 26 commissions scolaires découvriront une hausse supplémentaire en consultant l'avis de taxation qui leur sera posté d'ici un mois. L'augmentation qui les guette au cours des deux prochaines années cumulées risque d'être aussi élevée que celle de l'an dernier.
Avant de sauter aux conclusions, il faut attendre de voir ce que le premier budget du ministre des Finances, Carlos Leitao, nous réserve mercredi prochain.
Mais déjà cette semaine, le ministre de l'Éducation, Yves Bolduc, a affirmé qu'il serait «très difficile et très complexe» de forcer les commissions scolaires à remettre aux contribuables 100 millions de dollars sur 2 ans, accusant du même souffle les péquistes d'avoir semé la pagaille dans ce dossier.
Il n'y a pas à dire, le dossier de la taxe scolaire est fort complexe. Pour mieux comprendre, revenons d'abord en arrière.
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Juillet 2013. Comme au début de chaque été, les propriétaires reçoivent leur facture de taxe scolaire. À l'échelle de la province, la facture grimpe de 15% en moyenne.
Mais dans bien des régions, la hausse est encore plus difficile à avaler. Un exemple? À Bois-des-Filion, dans la couronne nord de Montréal, la facture moyenne bondit de 43%. Pour le propriétaire d'une maison type de 270 000$, la taxe passe ainsi de 474$ à 680$, soit un bond de 206$.
En fait, les propriétaires touchés par la hausse sont ceux qui bénéficiaient d'un rabais depuis sept ans, gracieuseté de Québec. En 2006, les libéraux de Jean Charest avaient accordé une aide spéciale pour éviter que l'ascension de la valeur des maisons entraîne une augmentation majeure de l'avis de taxation des contribuables.
Mais avec le temps, on s'est rendu compte que ce mécanisme de péréquation, atrocement compliqué, engendrait de graves effets pervers.
D'abord, les Montréalais n'ont jamais eu droit à l'aide de Québec, eux qui avaient pourtant essuyé des hausses marquées de leur évaluation municipale dès le début des années 2000. Nombreux sont ceux qui paient aujourd'hui plus de 1000$ de taxe scolaire par an.
Pendant ce temps, dans certaines banlieues en pleine explosion démographique, les propriétaires voyaient fondre leur facture, alors que la valeur de leur maison s'était considérablement appréciée. Bizarre, bizarre...
Plus les années s'écoulaient, plus la taxe scolaire devenait injuste.
Pour rétablir l'équité, le gouvernement péquiste a annoncé le retrait graduel de cette aide sur trois ans. Mais du même coup, il a privé les commissions scolaires de 150 millions pour 2013-2014, elles qui se plaignaient déjà des compressions imposées par Québec.
Au lieu de réduire leurs dépenses ou de rogner leurs surplus, les commissions scolaires ont laissé les contribuables absorber la quasi-totalité de la facture, avec la bénédiction du PQ.
Or, la hausse a soulevé un véritable tollé dans la population. Talonné par la Coalition avenir Québec, le PQ s'est finalement engagé, l'automne dernier, à forcer les commissions scolaires à rembourser une partie de la hausse aux contribuables en déposant le projet de loi 63.
Mais le projet est mort au feuilleton avec le déclenchement des élections, pour le plus grand bonheur des commissions scolaires qui sont majoritairement déficitaires.
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Dans toute cette saga, le retrait progressif de l'aide de Québec sur trois ans n'a jamais été annulé. Si les règles demeurent les mêmes, les commissions scolaires se verront donc retirer 68 millions de dollars en 2014-2015 et 68 millions en 2015-2016.
Voilà pourquoi les taxes vont encore grimper en juillet prochain. Mais cette fois, l'augmentation ne ciblera que 26 commissions scolaires, alors que la première vague avait touché 65 des 72 commissions, selon la Fédération des commissions scolaires du Québec.
Par exemple, la Commission scolaire des Hautes-Rivières, qui a perdu 7 millions l'an dernier, perdra encore 3,5 millions cette année, puis 3,5 millions l'an prochain. Pour compenser le manque à gagner, il y aura donc une augmentation de la facture de taxe d'environ 10% en juillet prochain. L'an dernier, les contribuables avaient subi une hausse de 20 à 30%, selon la municipalité.
Difficile de comprimer les dépenses. La Commission qui dessert notamment Saint-Jean-sur-Richelieu, Saint-Césaire et Marieville est en mode décroissance depuis sept ans.
Et les surplus? En théorie, il y a 17 millions dans les coffres. Mais la moitié représente des terrains et des bâtiments. Un quart est constitué de sommes versées durant l'année mais qui n'ont pas encore été dépensées à la fin de juin. En réalité, il ne reste que 3,5 millions, un coussin de sécurité bien raisonnable sur un budget d'environ 185 millions.
Alors, quoi? Les contribuables écoperont encore... à moins d'une surprise mercredi prochain.
STÉPHANIE GRAMMOND
La Presse (2014.06-02) - La Presse