Par Madame
Jeanne-Mance Paul
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L’auteure est
présidente de la Commission scolaire des Chênes
Madame Pauline
Marois, Première ministre du Québec,
Les derniers mois
ont suscité chez-nous, à la Commission scolaire des Chênes, des sentiments
diamétralement opposés.
D’une part, nous
avons vécu la joie découlant d’annonces d’investissements majeurs dans notre
région. Je pense ici à la construction d’une troisième « nouvelle école » sur notre territoire et à la mise en
place d’un programme de mécanique de véhicules lourds en formation
professionnelle.
D’autre part, malheureusement, vos récentes sorties
publiques au sujet des hausses de la taxe scolaire, ainsi que les reproches que
vous avez adressés aux commissions scolaires à ce sujet, suscitent chez-nous
étonnement, amère déception et indignation bien légitimes.
Je vous soumettrai
d’entrée de jeu que vos propos ont eu un effet passablement démotivant sur
l’ensemble de notre personnel (particulièrement celui qu’on qualifie « d’administratif »).
Ces femmes et hommes
qui se dévouent quotidiennement à la cause de l’éducation publique y ont perçu
une sorte de désaveu qu’ils ne méritent vraiment pas. Ils cumulent plusieurs
fonctions, sont « surchargés »
et en sont rendus à se questionner sur la place qu’occupe l’éducation publique dans
la liste des priorités de votre gouvernement. Et voilà qu’on les accuse d’être
de mauvais gestionnaires.
Sachez que, tous
autant que nous sommes autour de la table du conseil des commissaires de la
Commission scolaire des Chênes, nous réalisons bien que les contribuables qui
ont reçu leur compte de taxe et qui ont constaté la hausse qui leur est
imposée, réagissent. En toute franchise, j’ose dire qu’ils n’ont pas tort,
parce que, nous aussi, comme élus, avons vivement réagi… et continuons de le
faire.
Ce n’est pas de
gaieté de cœur que nous avons annoncé, en juin dernier, que cette hausse de
taxe planait au-dessus de nos têtes… et vous en étiez bien informée. C’est même
contre notre gré que nous avons fait ce choix, après avoir bien pesé tous les « pour », tous les « contre » et après avoir mis
sur la table tous les scénarios envisageables. Sachez que nous aurions voulu qu’il
en soit autrement.
Votre gouvernement a
décidé de sabrer 200 millions de dollars dans les subventions de péréquation
versées aux commissions scolaires. Chez-nous, cela représente 3,6 millions $ en
moins ! Pour faire image, je vous dirais que même si on décidait de « raser » notre centre
administratif au grand complet, nous n’arriverions pas à récupérer les 3,6
millions perdus en financement.
En fait, cela fait
maintenant trois ans que nous subissons des compressions majeures dans le
réseau de l’éducation. Uniquement pour notre commission scolaire, cela
représente des ponctions de l’ordre de 3 millions $ et la suppression de 30
postes administratifs.
Aujourd’hui vous
nous reprochez de ne pas avoir suffisamment réduit nos dépenses de nature
administrative. J’ose vous rappeler que le gouvernement du Québec nous impose,
depuis trois ans, une réduction de nos « dépenses
administratives » de 10 %.
Des données
provenant du Conseil exécutif du gouvernement du Québec (une source crédible s’il en est une), démontrent que la Commission
scolaire des Chênes a réduit ces mêmes dépenses de 26,3 %, dépassant de loin la cible imposée par Québec. Elle
figure au 4e rang des « bons
élèves » à cet égard, comme le titrait La Presse, dans son édition du 17 septembre 2013.
En toute humilité,
Madame Marois, nous considérons avoir fait nos devoirs !
Or, nous devons
subir l’odieux de devoir taxer davantage les contribuables, pour boucler notre
budget… ET NON POUR AUGMENTER NOS
DÉPENSES… que cela soit bien clair !
Permettez-moi de rappeler
ici à quoi sert la taxe scolaire. Elle permet de répondre aux besoins locaux et
de s’assurer de l’équité des services sur l’ensemble du territoire que nous
desservons. À l’instar de nos pairs, nous devons, par l’entremise des revenus
de la taxe; financer du personnel, comme les directions, les secrétaires, les
concierges des écoles et des centres, une partie du transport scolaire,
l’informatique et l’entretien des immeubles. Ces dépenses, vous en conviendrez,
sont incontournables.
Par ailleurs, j’ose
espérer que vous vous dissociez des discours du deuxième groupe de
l’opposition. Comme ancienne ministre de l’Éducation, nous nous attendons à ce
que vous dénonciez la campagne de désinformation que mène la CAQ et qui laisse
croire aux contribuables que les commissions scolaires nagent dans les surplus
et qu’elles sont au-dessus de leurs affaires.
Vous, mieux que
quiconque, savez que les surplus des commissions scolaires comprennent les
actifs, comme les terrains, les bâtiments, de même que des réserves pour le
financement des programmes sociaux des employés (comme les retraites).
Une fois qu’on a
fait abstraction de ces éléments, les surplus ont fondu comme neige au soleil.
Pis encore, on nous empêche d’utiliser plus de 32 % du surplus qui nous reste
pour faire face à nos obligations.
Ajoutons à cela que nous n’avons pas le droit de faire de déficit et que
nous ne devons pas amputer les services aux élèves (loin de nous cette idée!)… et le portrait est complet.
À la fin de tout ça,
je me désole de constater que l’éducation publique fait l’objet de la course au
déficit zéro, que d’année en année, le gouvernement nous demande de nous serrer
la ceinture et nous laisse le soin de refiler la facture aux contribuables.
Croyez-moi, c’est là un choix peu enviable que les élus scolaires n’ont
vraiment pas souhaité.
Malgré tout cela, nous
nous efforçons à tout mettre en œuvre pour préserver ce que nous avons de plus
précieux : les services offerts à nos élèves… et la réussite de ceux-ci.
En terminant, je vous
assure de notre disponibilité dans l’éventualité où vous jugeriez opportun de
nous rencontrer pour échanger avec nous sur le sujet. Cette invitation s’étend bien
sûr à votre collègue ministre responsable de notre région, M. Yves-François Blanchet,
qui, soit-il dit en passant, n’est pas avare de ses visites en nos murs et
manifeste régulièrement son intérêt pour nos différents projets et défis, ce
qui est fort apprécié de notre part.
Je vous prie de croire,
Madame Marois, en mes sentiments les meilleurs.
Jeanne-Mance Paul,
présidente
Commission scolaire des
Chênes
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